La semaine dernière, un vieux monsieur atteint de la maladie d'Alzheimer a été contacté par un label désireux de produire un disque après le visionnage d'une vidéo Youtube où le vieux chantait dans sa voiture. Le marché du disque n'est plus à une surprise près et on se demande bien ce qui motive encore de vrais musiciens à passer des années à apprendre à maîtriser un instrument, se réunir à plusieurs pour créer de la musique pendant des milliers d'heures et sortir un album alors qu'il suffira bientôt de péter dans sa douche pour faire les gros titres sur le net et créer le buzz. Heureusement que les sunlight, les paillettes et la célébrité reposant sur du vent ne sont pas une aspiration universelle et qu'il reste encore des artistes qui disent merde au système en concevant avec opiniâtreté, persévérance et talent des créations artistiques qui ont plus d'intérêt et de longévité qu'une punchline sur Topito.

Illustration par l'exemple avec le debut album de AEPHANEMER. Ce quatuor de Death Metal mélodique toulousain est emmené par une hurleuse et guitariste (Marion Bascoul) dont le death growl, forcément un ton en-dessous de la version masculine, donne à la musique du combo une tonalité particulière. Tonalité mise en avant par une rythmique toute en nuance qui évite de sombrer dans le trip technique et épileptique vu, revu et archi-revu de la scène Death actuelle. La batterie est posée, les lignes de rythmique suivent avec une belle harmonie, le lead guitare est bluffant et se met au service de la mélodie dans un bel ensemble. Le groupe revendique des influences scandinaves et intègre souvent à ses compos des lignes de violons ou des partitions de musiques traditionnelles nordique

Memento Mori est mis en image par un artwork représentant un temple grec rongé par une végétation tropicale sous un ciel nébuleux. Ce dessin réalisé par Niklas Sundin (DARK TRANQUILITY) annonce du brillant, du coloré, du chatoyant ainsi que du mystérieux et du romanesque. A ce stade de la découverte du projet, le seul point discordant est ce nom de groupe aussi compliqué à lire qu'à écrire. Mais refermons la parenthèse pour nous intéresser au coeur du sujet.

Le premier morceau est également le single pour lequel le combo a publié un video clip. Un choix judicieux car "Unstoppable" rassemble tous les ingrédients qu'on trouve dans Memento Mori. Une intro grandiloquente et cinématographique à base de violons et d'arpèges, une rythmique inventive, un death growl et une guitare lead qui suivent la même ligne mélodique. Heureusement, le groupe a le bon goût de ne pas adopter systématiquement le même cheminement, jouant notamment sur les variations de tempo. On retrouve cependant souvent ces ingrédients signature dans chaque morceau, notamment le bouquet de violons qui donne aux compos un peu d'allant mais parfois un peu trop de sucré, un côté ritournelle pour enfants tendance "dansons la capucine" qui fait tâche. C'est d'autant plus dommage qu'à bien des occasions, comme "Hellbore", "Crowns" ou sur la splendide intro hommage à AMON AMARTH de "The Oathsworn", Martin Hamiche (lead guitare) prouve qu'il est capable de faire le job avec son manche à cordes et un son bien plus Metal et mordant qu'un sample de violons!
L'instrument fétiche de Catherine Lara et André Rieux n'est pas le seul invité surprise de la galette. On trouve également d'autres cordes classiques, du piano et des instruments plus exotiques et, hélas, non crédités au générique. C'est heureusement par petites touches que ces inserts exogènes sont intégrés à la trame.

Pas de doutes, Memento Mori fait le job. On peut toutefois regretter que plusieurs passages un peu trop posés tirent le projet vers le Metal mélodique avec pour argument Death le chant vociféré et la double pédale. Mais, avec ses ambiances féériques, sa guitare lumineuse et ses thèmes classiques ou scandinaves, le projet dispose de solides arguments pour rassasier les amateurs de musiques extrêmes et contrastées.