BROKEN PRAYER (usa) - Misanthropocentric AKA Droid's Blood (2015)
Label : Sorry State Records
Sortie du Scud : 9 mars 2015
Pays : Etats-Unis
Genre : Dark Pop Hardcore
Type : Album
Playtime : 12 Titres - 25 Mins
Sorry State Records, c'est plus qu'un label, c'est une famille, un refuge pour cinglés en tout genre, une congrégation de furieux qui n'auraient certainement pas pu trouver asile ailleurs. La liste de leurs fidèles/pensionnaires/patients est impressionnante, et on y trouve pèle mêle MANIPULATION, DOUBLE NEGATIVE, WHATEVER BRAINS, CROSS LAWS, RULETA RUSA et autres NO TOMORROW. Vous commencez déjà à y voir un peu plus clair en lisant le livre d'or ?
Oui, les dédicaces sont raturées, parfois pleines de fautes sur seulement une dizaine de mots, mais le tout exsude la sincérité par les trous de nez.
Et ça tombe bien, parce qu'aujourd'hui ce label activiste et hyperactif vient encore de me procurer bien des sensations fortes, une bonne dose de plaisir, en gros, de quoi finir la journée bon pied bon oeil.
Les BROKEN PRAYER nous viennent de Chicago, et n'ont pas froid aux yeux, ni aux oreilles, et encore moins au cerveau. Il tourne à plein régime depuis un peu plus deux ans, et un LP éponyme qui avait surpris pas mal de monde fin 2012.
Ils auraient pu être un Hardcore band parmi tant d'autres, mais leurs influences couvraient tellement de terrain que cette option était beaucoup trop restrictive. Broken Prayer avait fait tiquer bien des spécialistes à l'époque. Car loin de se contenter du minimum, Joey, Liz, Mark, Nick et Scott, malgré leurs prénoms dignes d'un casting de Horror B Movie, à une Alice près, cherchaient plus loin, et s'intéressaient à tout. Et ce deuxième LP est là pour le prouver.
Rien n'est simple avec eux, et vous vous en rendrez compte dès "Kid".
Si certains morceaux rappellent la vague lo-fi des années 90/2000, GIRLS AGAINST BOYS en tête, comme le fumant "Good Dudes", le reste est un assemblage hétéroclite de Punk bricolé au Hardcore mélodique, saupoudré de Pop synthétique et d'arrangements digne d'un Atari des années 80. Le son est compact, sauvage, les chansons difficiles à apprivoiser, à l'image de ce "Blood Suckers" complètement barré. Subtil mobile en déséquilibre constant, reposant sur une base fuzz et distordue, sur laquelle viennent se greffer un chant époumoné et une basse linéaire et bien grasse, c'est l'exemple type de ce que ce groupe unique est capable de produire. Et le fait d'avoir enchaîné cette excroissance difficilement identifiable avec un brûlot aussi définitivement fastcore que "Grown Up Problems" est presque un aveu de la part du quintette. Vous ne savez pas où nous situer ? Vous ne savez pas à quoi vous attendre ? Et bien tant mieux, parce qu'on fait ce qu'on veut.
C'est quelque part un peu l'esprit Garage adapté aux standards de l'époque, c'est foncièrement alternatif dans le sens premier du terme, puissant à n'en point douter, mais aussi étrange, bizarre, inconfortable et pourtant terriblement attachant. Comme un cocktail au goût acide vers lequel on revient pourtant. Un cocktail enivrant qui mélange l'esprit frondeur et juvénile du BLACK FLAG le plus boutonneux, le sens de l'aventure des YOUTH, en version expurgée jusqu'à l'ossature, un peu de PIXIES aussi pour ce chant goguenard, et une large cuillère de fastcore moderne et sans compromis.
Le LP se partage entre saillies brèves et instantanées, qui restent la plupart du temps classiques et outrancières, mais qui savent aussi se barrer salement en couille comme le démontre ce "Kid" initial dont je ne me suis toujours pas remis. Synthé minimaliste qui tisse de fines couches infantiles en boucles, basse qui gronde, guitares abrasives, et mélodie sous jacente pour une minute et quarante seconde de délire total et entraînant. Parce qu'en plus, c'est à moitié dansant, alors inutile de vous dire à quel point c'est bizarre...Ca peut aussi ressembler à "Lesson", qui tire la bourre au delà du raisonnable sur à peine une minute avec une furia dévastatrice lacérée par des stridences à la MERZBOW.
Mais - et c'est bien la le pire - ça peut aussi s'étendre sur un peu plus de trois minutes pour un pseudo hit Dark Pop improbable, comme le démontre sans peine l'ovni "Colors" qui se souvient des dérives synth Pop des 80's et qui l'adapte au Core des années 2000. C'est joyeux et brutal, soyeux et animal, en tout cas, ça s'incruste dans le crâne et c'est impossible de s'en débarrasser.
Et puis, juste après ou presque, ça pue le IMPULSE MANSLAUGHTER à plein nez, et "More Violence" de ne plus cacher ses intentions et de tout charcler sur un tempo épileptique de plus. De temps en temps, c'est bancal, ça pulse mais sans trop savoir de quel côté, et ça devient grouillant, rampant, avec une basse toujours mise plus en avant, et des guitares à la Post Rock/Cold Punk, et un refrain presque juste, et "Summer With Insomnia" de nous paumer un peu plus dans un labyrinthe d'idées farfelues, mais bien trouvées.
Il y a des albums comme ça qu'on a du mal à situer, et c'est tant mieux. La normalité, c'est chiant. Après tout, Misanthropocentric est à l'image de la vie. Un poil bordélique, sincère, imprévisible, parfois insupportable, mais tellement...
Tellement quoi d'ailleurs ?
Ajouté : Mardi 04 Août 2015 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Broken Prayer Website Hits: 5318
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