EATING SHIT (FRA) - Supersonic Black Metal (2013)
Label : Auto-Production
Sortie du Scud : 17 juin 2013
Pays : France
Genre : Black Metal / Grind / Electro
Type : Album
Playtime : 13 Titres - 38 Mins
Avec des pincettes et des gants. Il ne faut jamais se moquer trop violement du Black Metal. Cette institution a les moyens de vous faire parler. Ceci étant, ce n'est pas comme si c'était la première fois que quelqu'un osait dire que le blackeux de base, après une bonne séance de corpsepainting mentalement revivifiante (mais terriblement nocive pour l'épiderme), ressemble davantage à un panda grimaçant qu'à un macchabée terrifiant. Alors quitte à être extrême, autant l'être jusqu'au bout. Les pandas d'EATING SHIT sont roses et mignons. Ils consomment certainement plus de bambou que de cervelle de Dead et c'est tant mieux. Passer du Grind au Black, le virage pourrait paraître étonnant, mais c'est mal connaître ce trio d'Annecy qui est toujours allé au fond de sa démarche, quitte à se baser sur une boîte à rythmes bien dégueulasse au moment de composer Bon Appétit, un premier album sorti il y a maintenant deux ans. Alors oui, c'est avec une certaine perplexité qu'on pourra accueillir ce second effort dont le nom, Supersonic Black Metal, trahit déjà un peu la personnalité versatile.
Pour l'occasion, les mecs ont joué le jeu jusqu'au bout. Maquillage, police d'écriture gothique, mise en scène entre glauque et bisounours, tout est finalement très en phase avec l'univers du Black Metal, y compris la musique. Seuls de souriants pandas fuchsias viennent jeter un froid et nous en dévoilent davantage sur l'état d'esprit du groupe. Je n'en ai pas la confirmation officielle, mais vraisemblablement, ce second effort est un bouillon de second degré. Très éloigné musicalement de Bon Appétit qui nous cuisinait un Grind / Crust primaire et instinctif, Supersonic Black Metal tombe comme prévu dans une mixture mêlant Black Metal et Grind. Quelque part entre la force de frappe d'ANAAL NATHRAKH, le style de vie FADADES et le minimalisme de THE PROCESSUS, cet album est un pamphlet déjanté sur l'Art Noir. Et le pire dans l'histoire, c'est qu'en plus d'être parfaitement caricatural (avec par exemple "From Black Til Grind", cette intro mélo-angoissante typique ou "Carte Noir", ce déchainement caféiné de médiocrité bruitiste qu'un RAGNAROK n'aurait osé assumer), EATING SHIT est copieusement doué. Mis à part certains vocaux Grind, certaines nappes électroniques ou cette BAR qui tient un peu mieux son rôle, l'illusion est parfaite. Le trio enfile les références comme des perles, de MARDUK pour le côté brutal à DIMMU BORGIR pour les pseudo-orchestrations sur "Respect" et quand on connaît l'atmosphère barrée qui régnait sur Bon Appétit, on ne peut que sourire devant une telle mascarade. La grande force de cet opus, c'est également de dérouler beaucoup plus vite que n'importe quel album de Black brutal, et ce grâce à une boîte à rythmes qui, je le soulignais plus haut, à trouvé un terrain de jeu plus à même de mettre en valeur sa superficialité. Là où le Grind est un style humain, qui vient des tripes et qui ne tolère aucun arrangement, le Black peut se permettre ce genre d'artifice puisqu'il est ici ouvertement caricaturé. Supersonic Black Metal se savoure de cette manière. Pas tant pour son originalité artistique quasi-inexistante (quoique la satire est peut-être une forme d'art ?) mais plutôt pour ce franc moment d'expérimentations nimbé d'un mauvais goût assez savoureux.
Supersonic Black Metal n'est pas un disque stigmatisant. L'idée n'est pas d'avancer que n'importe quel blanc-bec peut pratiquer du Black Metal. Je pense qu'il est plutôt un disque ouvert d'esprit qui offre une tribune décalée et novatrice (à cause des nombreux arrangements) à ce style musical contestataire. Chacun pourra en faire sa propre interprétation. C'est ce qui le rend si intéressant à défaut d'être un chef d'œuvre ultime de création musicale. Encore faut-il accepter de rentrer dans le trip. Ca, Desproges l'avait bien compris et nous a laissé en héritage une citation intemporelle.
On peut rire de tout mais pas avec tout le monde.
Ajouté : Samedi 08 Mars 2014 Chroniqueur : Stef. Score : Lien en relation: http://eatingshit.bandcamp.com Hits: 6352
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