QUEENSRYCHE (usa) - Dedicated To Chaos (2011)
Label : Roadrunner Records
Sortie du Scud : 28 juin 2011
Pays : Etats-Unis
Genre : Hard Rock
Type : Album
Playtime : 16 Titres - 71 Mins
Que la controverse commence…
De mémoire de chroniqueur, je n’ai jamais vu une telle volée de bois vert que l’accueil réservé au nouveau QUEENSRŸCHE par mes collègues des webzines. Tout y est passé, de l’insulte crasse et gratuite, jusqu’à l’analyse poussée et argumentée. Mais le résultat, dans 95% des cas, est le même.
Dedicated To Chaos est une bouse.
Je ne l’avais pas encore écouté, mais j’étais fan, comme vous le savez, d’American Soldier. Qui lui aussi avait eu droit à sa part de haine. Alors, j’ai lancé le CD, un peu craintif en me remémorant les épithètes employés pour le décrire, et je l’ai laissé infuser, encore et encore, d’où cette chronique tardive.
Et vous savez quoi ?
Je l’aime cet album.
Première chose, désolé de te contredire mon cher Geoff, mais il ne ressemble en rien à un Empire projeté vingt cinq ans en avant. Empire fut un chef d’œuvre, de ceux que l’on ne commet qu’une seule fois dans sa vie. Il était organique, magique, empirique et pourtant si réel. Et surtout, sans défauts.
Or, Dedicated To Chaos, aussi délicieux soit il, en est bourré. Mais c’est justement ça qui fait son charme.
Et par extension, le charme de ton groupe.
QUEENSRŸCHE, ou l’art consommé de ne jamais se répéter, au risque de s’aliéner en permanence une partie de son following. Le poil à gratter intelligent.
C’est dingue comme ce mot peut sans cesse revenir lorsqu’on parle du gang de Seattle.
Mais parlons ce nouveau né je vous prie, puisque tel est l’objet de cette chronique.
Je comprends tout à fait qu’il ait pu en irriter un certain nombre. QUEENSRŸCHE a déjà par le passé sorti des albums atypiques (Hear In The Now Frontier en est peut être le symbole ultime, et, pour les nostalgiques de DeGarmo qui ne cessent de pleurnicher depuis son départ, c’est quand même lui qui en était en grande partie responsable…), mais jamais ils n’avaient poussé le concept à ce point.
Soyons honnête et lucide, Dedicated To Chaos est tout sauf du Metal, et parfois, n’est même pas Rock. Au petit jeu des comparaisons, on pourrait le rapprocher du Eye II Eye de SCORPIONS pour sa façon de taper là où ça fait mal. Sans aller jusqu’à paraphraser certains journalistes qui ont presque cru que le groupe avait fait exprès de placer les chansons les plus « remuantes » au début du LP, il faut avouer que le quintette noie bien le poisson à mi album.
Et c’est amusant, parce que justement, « Get Started » me fait justement penser à une entrée en matière qui avait fait grincer bien des dents il y a quelques années. « New Millennium» sur Falling Into Infinity, ça vous dit quelque chose ? Même up-tempo roublard, même son Pop-Rock, même voix nonchalante… Et il y a quatorze ans, DREAM THEATER aussi s’était mangé bien des beignes pour avoir osé s’aventurer sur le terrain d’un Rock diablement mâtiné de Pop…
Mais après avoir écouté ce titre, dites vous juste que c’est quasiment ce que l’album a de plus agressif à proposer… Car après « Hot Spot Junkie » et son riff inventif et son refrain entêtant, c’est le désert agonisant de la non violence.
Bien annoncé par un « Got It Bad » qui calque d’une certaine manière « Della Brown » en version light et courte (on revient quand même à Empire…), le single « Around The World » est quasiment un aveu, et certainement la façon la plus honnête d’annoncer un album !
On pourrait parler de U2 (la guitare de Wilton sonne parfois vraiment comme celle de The Edge), d’un David Bowie 80’s, de ce qu’on veut, de tout, sauf du Metal bien sur. Mais faut-il pour autant rejeter un groupe sous prétexte qu’il refuse les conventions et les barrières ?
Et nous en arrivons au postulat suivant : pour aimer le dernier QUEENSRŸCHE, il faut aimer la musique, tout simplement. La musique créative, impulsive, personnelle.
Aurait-il mieux valu que le quatuor se force et tente de ressortir une resucée de Mindcrime une fois encore, au risque de décevoir encore plus ?
Certainement pas.
Ecoutez attentivement le pont de « Higher », sa basse chaloupée, son rythme en porte à faux, et son crescendo final. Oseriez-vous me dire que ça n’en valait pas la peine ?
Ok, « Retail Therapy » est cool, très cool, mais quelle mélodie !
L’intro délicate au piano/sax de « Broken » est de toute beauté. Et n’oublions pas que DREAM THEATER avait déjà utilisé des instruments à contre courant sur Images And Words, qui pour beaucoup reste leur chef d’œuvre. Alors inutile de crier haro sur le baudet. « Broken », si j’ose, est à placer en parallèle de « Silent Lucidity » au panthéon des plus belles chansons du RŸCHE. Du cristal, oui, du cristal… Et Geoff qui une fois de plus atteint des sommets d’émotion.
Le groove de « I Believe » est irrésistible. La basse d’Eddie est ronflante, ronde, glissante, et louvoie à travers les méandres d’un titre accrocheur en diable. Geoff module à merveille, et Scott reste sans cesse sur le qui vive de l’inventivité.
« Wot We Do » est peinarde, juste peinarde. Et ce solo de sax, encore une fois, comme c’est malin…
« The Lie » est ce que la fin de l’album à de plus teigneux à proposer. Mais cette rythmique chaloupée, ce chant vénéneux, et ces chœurs lointains sont le signe indubitable que l’agressivité ne suffit pas. Ca ressemble à du Tea Party, et ça pourrait en être, et c’est un compliment.
Ne reste plus à « Big Noize » qu’à clôturer cet album de la même manière qu’il avait commencé. De façon absconse et hermétique.
Alors…
Oui, vous pouvez détester, je comprends, mais je vous interdis d’insulter un groupe qui n’a de cesse que de se remettre en question. D’avancer, coûte que coûte. De fouiller, de chercher plus loin que le bout de son nez une évidence qui n’existe pas.
Dedicated To Chaos n’est ni Mindcrime, ni Empire, ni même American Soldier. Tout comme Q2K n’était ni The Warning, ni Promised Land ou Rage For Order.
Le commentaire le plus récurrent en réaction à mes chroniques négatives est que je ne suis sûrement pas musicien et que je ferais mieux de me taire plutôt que de critiquer des albums que je serais incapable de reproduire. D’une, je suis musicien, et je vous emmerde. De deux, pour une fois, c’est moi qui userais de ce commentaire stupide.
Essayez d’être un musicien aussi intelligent, versatile et créatif que ceux qui ont un jour formé ce groupe d’exception qu’est QUEENSRŸCHE. Et désolé. La maison de disque ne m’a pas acheté pour dire ça.
L’amour de la musique, ça n’a pas de prix.
Ajouté : Mercredi 10 Août 2011 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Queensrÿche Website Hits: 10118
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