Alors que les plus anciens appellent à l’indignation, leurs puînés sont plutôt dans une optique de résistance. L’écart générationnel justifie les moyens. La fougue, la rage, l’énergie et l’envie de la jeunesse triomphante lui donne encore la carapace pour résister. Les rides naissantes, on se contente de s’indigner. En ce qui concerne les Belges de RESISTANCE, voilà maintenant huit années qu’ils évoluent dans l’ombre, le Metal extrême belge étant principalement représenté par les gorets d’ABORTED. On s’est d’ailleurs beaucoup focalisé sur ces derniers avec la sortie de Global Flatline mais croyez-moi, To Judge And Enslave vaut également le détour. Ce quatrième album s’impose à eux comme un cap dangereux. Une sorte de stop ou encore, duquel seuls les formations vraiment costaudes savent s’extirper.

On qualifie souvent leur musique de Deathcore à tendance brutal. Moi le premier. Pour être tout à fait exact, ce mur de son est plutôt à mi-chemin entre le Death Metal et le Hardcore. Le raccord entre les deux styles est rare. Il existe mais mieux vaut l’oublier, car ce n’est pas lui qui fait la force de ce disque. Non. En plus d’être une véritable machine de guerre, RESISTANCE confirme sur cet opus tout le bien qu’on pensait de lui sur Lords Of Torment. Ces Belges ont progressé à chaque niveau, sauf un. Ils continuent de tartiner un max au début, avec de grosses pièces de viande comme « Make Belief Savior » ou « Oblivious » avant de lever progressivement le pied, au point d’en devenir vraiment quelconque sur les derniers accords. Ce petit défaut de conception est heureusement maquillé par une astuce imparable qui aère considérablement cet opus, les modulations rythmiques. Très souvent, RESISTANCE tombe dans le mid-tempo harangueur, apportant cette dose de lourdeur sans égal. Mais également, ils versent parfois dans des accélérations remarquables, aux frontières du Punk (« E.N.S.L.A.V.E.D. » avec Leif de DEW-SCENTED ou « Brutalized »). C’est cette diversité, combinée à une opacité poignante et à un jeu puissant qui fait tout le charme de ce disque. Il y a une facette vraiment moderne dans ce Death, et plus particulièrement dans les vocaux qui jonglent entre des cris perçants et d’autres, plus gutturaux. Vous me direz que c’est classique. Oui mais c’est bien fait et ça suit une certaine logique. RESISTANCE a affiné son jeu, a redirigé ses efforts vers la composition, au point d’en réaliser un album en différentes palettes de gouts, qui plaira peut-être à un plus grand nombre que leurs travaux passés. Mais au-delà d’une bonne claque d’une demi-heure, cet enregistrement ne fera pas énormément d’effet. On a quand même du mal à concevoir que ces solides gaillards pourront un jour accéder à l’échelon supérieur, bien qu’ils puissent être fiers comme des coqs d’en être à ce niveau. Rares sont les sorties qui sont à ce point à fleur de peau et ça, RESISTANCE peut s’en féliciter.

Supérieur de bout en bout par rapport à Lords Of Torment, To Judge And Enslave affiche des progrès qui font plaisir à entendre, pour quiconque connaît leurs créations précédentes. Seulement et comme à chaque fois, on attend beaucoup plus d’un album de RESISTANCE et en dépit d’une montée en régime évidente, je crains qu’il ne faille encore patienter un peu avant de retrouver ces Belges à la place qui devrait être la leur. En toute connaissance de cause, on peut néanmoins rassurer Sven De Caluwé ; la relève se bat pour faire son trou.