Je ne savais pas si j’étais vraiment prêt à écouter Hymns Of Ghastly Horror. D’ailleurs, je crois que je ne l’étais pas. In Grisly Rapture était encore trop frais dans mes oreilles. Toutes ces références au cinéma horrifique de série B des années 70-80 m’ont donné le tournis. Entre Bava, Fulci, Zito et Crounse, les éloges macabres pleuvaient. REVOLTING est ce groupe de Death suédois qui a pour moteur les yeux qui sortent des orbites, les crânes qui explosent, les trachées tranchées, les monstres maquillés comme des voitures volées et, il faut bien le dire, le côté kitsch de l’affaire, qui se ressent à fond les ballons dans cette musique plus rigolote qu’effrayante. La faute à qui ? Je vous le donne en mille. Roger Johansson, plus connu sous le pseudonyme de « Rogga » ou de « Revolting Rogga ». Le pauvre n’en peut plus. Impliqué de près ou de loin dans pas moins de treize projets, parmi lesquels DEMIURG, BONE GNAWER, BLOODGUT, RIBSPREADER, PAGANIZER, THOSE WHO BRING THE TORTURE, son cerveau est en plein dysfonctionnement. Et pourtant, comment fait-il pour ne pas ramer ?

La vérité, elle est comme un coup de lame de The Prowler, elle ne s’évite pas. Hymns Of Ghastly Horror est supérieur, dans tous les domaines, à In Grisly Rapture. Parce que si ce dernier était engagé dans un trip visuel morbide censé déteindre un minimum sur leur Death Metal, la pratique montrait une réalité bien différente, avec une exécution sans folie, un songwriting timide et au final, trop peu d’ambiances pour qu’on prenne peur. C’est donc avec soulagement qu’on réalise que ce quatrième effort est finalement doté d’un peu de cohérence. On mettra du temps à s’en rendre compte, mais « Lair Of The Black Queen » est une compo qui ne trompe pas. Si son déroulement est plutôt classique, son final s’emballe, proposant une conclusion mélodique teintée de hurlements déchirants. REVOLTING fait enfin honneur à son statut de groupe de Death horrifique. On ne leur demandait pas forcément de virer dans le gore, d’autant que leurs morceaux ne sont pas d’une violence inouïe, mais simplement de coller un peu plus avec le thème. C’est enfin chose faite, et les Suédois, à la surprise générale, accentuent leurs efforts avec « The Thing That C.H.U.D Not Be » (je vous laisse le soin d’apprécier le jeu de mot), une instrumentale aliénante bourrée de samples, qui effectue un rapprochement intéressant entre le The Thing de Carpenter en 1982 et le C.H.U.D de Douglas Cheek en 1984. On retrouve avec un réel plaisir le côté groove et épique qui faisait rage au cœur d’In Grisly Rapture, sauf qu’ici, tout semble motivé par le désir d’harmonie entre concept et musique. Certains plans évoquent toujours AMON AMARTH et quand on connaît le génie mélodique de nos vikings favoris, ce n’est pas un mince exploit. L’enchainement entre « Prey To Katahdin » (référence à Prophecy de Frankenheimer en 1979) et l’entrainante « Kinderfeeder » est d’un magnétisme saisissant. On ignorait Rogga capable d’une telle souplesse artistique, lui qui s’illustre généralement au sein de projets plutôt connus pour leur rigidité.

Hymns Of Ghastly Horror est donc cette bonne surprise de fin d’année qu’on n’attendait pas vraiment. D’autant plus qu’elle est l’œuvre d’une formation qui s’est souvent illustrée défavorablement à cause d’un concept usé jusqu’à la corde, d’un manque de rigueur musicale et d’un second degré qui trahit bien vite le peu de prétention qu’ils ont. REVOLTING semble enfin prendre conscience de son potentiel et son Death Metal, qui était totalement décrédibilisé par les collages Photoshop de vieux monstres pathétiques, même plus capables d’éventrer un vieillard paralytique, est soudain devenu saisissant de réalisme. La folie de Lucio Fulci a finalement eu raison du peu de présence d’esprit qu’il leur restait, et c’est tant mieux !