MYGRAIN (fi) - MyGrain (2011)
Label : Spinefarm Records
Sortie du Scud : 12 janvier 2011
Pays : Finlande
Genre : Death Metal Mélodique Moderne
Type : Album
Playtime : 9 Titres - 51 Mins
Le retour de MYGRAIN, qui va nous donner toujours plus mal à la t… non, stop ! Je ne vais pas vous faire le plaisir de m’abaisser à des jeux de mots aussi clichés ; surtout que ce nouveau disque des Finlandais ne les mérite clairement pas. "La troisième, c’est la bonne !", comme on dit ; ou, parmi la scène musicale, c’est soi-disant l’album de la maturité. Une étape décisive, donc, pour le groupe qui commençait déjà à stagner musicalement sur Signs Of Existence, malgré une agressivité plus présente. Embourbés dans ce genre dont ils ne se démarquaient guère, la formation helsinkienne a décidé, cette fois-ci, de réagir et revoir sa conception musicale pour enfin proposer un produit reflétant bien plus sa personnalité.
Si les pochettes des deux premiers disques s’inscrivaient dans des caractéristiques classiques d’œuvres d’Extrême Mélodique – un style sombre, torturé, onirique – MYGRAIN semble bien décidé à marquer pleinement la scission avec ce passé débutant, et opte pour un artwork explosif, plongeant au cœur d’une boule de flammes aguicheuses et ardentes, aux couleurs pétantes, que ne saurait renier une compilation de tubes Electro de l’été, comme j’ai pu le lire sur un autre webzine. Outre ce design marquant le coup, les noms d’albums sont également bien représentatifs de l’évolution opérée. Et sortir un album intitulé à l’image du groupe insiste sur le fait que celui-ci s’est pleinement trouvé musicalement, appuyant cette maturité gagnée. Mais cette envie de se renouveler ne s’en tient pas qu’à cet enrobage, les Finlandais ont aussi arrêté de traiter en long et en large de problèmes émotionnels et tout l’attirail des souffrances intérieures les accompagnant, et s’orientent maintenant sur des textes en adéquation avec leurs sonorités futuristes délivrées par les claviers, c’est-à-dire des écrits bien ancrés dans la science-fiction, sans aucun doute inspirés de SCAR SYMMETRY, l’apport de spiritualisme en plus, et des métaphores tordues à foison ; la récente collaboration avec UNIVERSUM aurait-elle eu une influence sur ce revirement ?
Et ce n’est pas fini ! Le groupe a redoublé d’effort pour mettre en avant ce nouveau son, et si l’on pouvait décrire cet album d’un seul mot, ce serait définitivement : "PLUS" ; plus mélodique, plus puissant, plus original, plus accrocheur, plus moderne… Pour cela, changement de studios et d’équipe de production/mixage/mastering qui étaient restés fidèles aux crédits depuis Orbit Dance. Entouré de Janne Joutsenniemi (Shitsilo Studios) et Dan Swanö (Unisound Studio), le combo est littéralement avantagé par ce son énorme, propre, mais qui conserve sa dimension humaine ; chaque instrument est vraiment privilégié et peut désormais clamer sa présence sans rester enlisé dans le marasme du fond sonore. Le rendu moderne des différentes lignes concorde parfaitement avec l’esprit du groupe, et impacte sur l’efficience d’accroche démultipliée, tout autant que la section rythmique bien bâtie rendue, de nouveau, surpuissante.
J’ai parlé d’un aspect mélodique davantage prononcé ; en effet, cet opus le doit à ses guitares qui le mènent de bout en bout. Oubliez tout de suite les enchaînements acerbes de riffs grondants qui constituaient les précédents disques, ne laissant que peu d’espace pour quelques démonstrations. Matthew s’étant retiré du circuit, Mr. Downhill s’est empressé de récupérer son poste vacant au manche de la guitare lead. Ainsi, sa récente présence agit, sans conteste, comme une formidable bouffée d’air frais pour toute la formation, qui se voit gratifiée d’un membre plus qu’inspiré et au talent flagrant. Cette nouvelle approche de MYGRAIN de leur musique, orientant son disque sur les cordes, permet alors de mettre le travail du nouveau venu superbement en exergue, sa technique pouvant être assimilable à la jeunesse de CHILDREN OF BODOM. La comparaison n’est pas trop exagérée puisque ses lignes se révèlent tout simplement magnifiques, fourmillant d’harmonies, et dévoilant une dextérité de haute volée. Entre leads de folie et riffs ultra mélodiques hypnotiques justement placés, les solos legato s’enchaînent à la pelle, toujours dotés d’un feeling moderne saisissant (« Dust Devils And Cosmic Storms »), abattant tapping et sweep picking sur des envolées shreds jouissives (« Shadow People »). Bien que toutes les démonstrations concordent avec les ambiances des compositions, leur grande présence en révèle certaines plus dispensables au sein des pistes dans lesquelles elles interviennent (« Eye Of The Void »). La guitare rythmique, quant à elle, n’est pas en reste et accompagne sa consœur à merveille au sein de mélodies rythmées irrésistibles. La reprise d’un riff d’IN FLAMES (« Drenched In Fear »), sur « A Clockwork Apocalypse », confirme les influences modernes assimilées lors de la conception de MyGrain. La production permet de la faire clairement ressortir, et celle-ci affiche une activité fervente et rigoureuse, complétant parfaitement sa voisine, maniée par Jonas.
Amateurs de basse ronde et accentuée, vous serez un peu plus lésés dans cet opus où le mot d’ordre est aux superlatifs. Même si cette dernière ne supplante pas encore tous les instruments et se fait timide en début d’album, un gros effort a été fait pour la distinguer dans le mix. Un problème récurrent chez les Finlandais, mais qui s’améliore tout de même nettement, la preuve en est avec le garnissage profond de « Trapped In A Hourglass », ainsi que sur la piste suivante, ou même sa présence sur « Of Immortal Aeons », dont elle introduit le refrain excellemment ! Un titre possédant, assurément, une des meilleures rythmiques de l’album, avec des dialogues entre basse et guitare qui se renvoient des riffs incisifs. Autrement, elle conserve généralement son rôle de support, mais réapparaît parfois rapidement lors des breaks ou évolutions de structures, rassurant de sa présence imposante.
Pour relativiser, difficile de s’imposer distinctement au sein de la rythmique face au monstre qu’est DJ Locomotive. Le bonhomme continue d’honorer très fièrement son pseudonyme, délivrant, sans concessions, déflagrations de percussions et déferlantes de double pédale exacerbées. Galopant intensément à travers les titres, il les façonne de tempos impulsifs et évolutifs, scotchant l’auditeur dès les premiers heurts pour ne le relâcher qu’une fois dépouillé et essoufflé, cinquante minutes plus tard. Son jeu est vif, garni d’accélérations puissantes qui se terminent souvent en blast beats, et s’avère un apport absolu aux compositions, qui lui doivent une grande partie de leur accroche. Les cadences effrénées de l’instrument, interrompues par de rares instants de répit acoustique, offrent à l’album une fougue délicieuse. Qui plus est, DJ Locomotive réalise des schémas organiques et diversifiés, qui s’arment de nombreux détours et appuient la maturité ressentie sur ce disque.
Effectivement, les compositions surprennent par leur longueur. MYGRAIN s’éloigne du groupe moderne typique et ne se contente plus de proposer des titres directs et peu approfondis, mais plutôt des morceaux réfléchis, et variés, résistant à la facilité des enchaînements classiques des couplets-refrains. L’album, en lui-même, apparaît nuancé en ce qui concerne les pistes puisque certaines ont un aspect totalement tubesque, entraîneur au possible, et à l’impact immédiat, à l’instar de « Into The Parallel Universe », avec ses déluges de mélodies synthétisées et riffs énergiques, et son ultime refrain prenant une ampleur rare. D’autres pistes, sans pour autant perdre leurs propriétés d’efficacité moderne, adoptent un profil laissant davantage de liberté aux atmosphères, résultant notamment des claviers et nombreux ponts, comme sur « Cataclysm Child » qui joue beaucoup sur le ressenti global avec ses différents breaks, retournements de rythmiques et mélodies du refrain ambiancées, ou « Xenomorphic » qui se pare de passages plus Rock, avec la présence vocale de Lars Eikind (BEFORE THE DAWN), dans un style similaire au dernier album de FALL OF THE LEAFE. Certains titres s’avèrent, en profondeur, plus complexes et témoignent d’un assemblage de lignes instrumentales soignées, à l’image de « A Clockwork Apocalypase », possédant un pont Prog faisant penser à du Arjen Lucassen, les cordes frottées en moins, et se terminant sur une augmentation du tempo par paliers, soutenu d’une mélodie à l’allure symphonique, très prenante. Finalement, seul « Eye Of The Void » semble un peu en deçà, ses démonstrations virtuoses et la rapide apparition de Ilja Jalkanen (KIUAS), ainsi qu’une présence des claviers plus importante, ne parvenant même pas à la rendre mémorable.
Bien que mélodie et modernisme soient à l’honneur sur cet album homonyme, Eve Kojo a une utilisation de ses touches pourtant moins proéminente que par le passé. Les lignes principales étant englouties par le doigté sans limites de Mr. Downhill, la jeune femme se contente d’accompagner légèrement ses cordes. Finies donc les apports pompeux, pas toujours bien intégrés aux compositions, ses samples sont ici en parfaite cohésion avec la tonalité des pistes. Moins électroniques, ils s’ornent d’une superbe sonorité, assez particulière, fluide et velouté, une sorte d’évolution de ce que l’on pouvait trouver sur « Veil Of Sun » et « Alienation », avec cet aspect futuriste bien plus approfondi, et leur utilisation sur les leads mélodiques de « Of Immortal Aeons », en compagnie des cordes harmonisées, est absolument irrésistible. Les ponts, quant à eux, se garnissent plutôt de nappes atmosphériques du plus bel effet. Quelques bruitages sont aussi de la partie, principalement discrets, mais assez ennuyants sur « Trapped In A Hourglass », où l’on croirait recevoir des messages de discussion instantanée. L’aspect science-fiction abordé par les textes est donc pleinement sonorisé via cet instrument qui agrémente impeccablement les compositions, à l’exemple de l’intro/outro du dernier morceau, ou des samples de « Dust Devils And Cosmic Storms », un titre à la croisée d’un RAUNCHY pour ses refrains, et d’un SOILWORK pour les vocaux hurlés.
Ce qui nous mène à la prestation phénoménale de Tommy Tuovinen, dont l’évolution vocale remarquable a permis de façonner la nouvelle identité musicale des Finlandais. Le frontman sert une alternance de vocaux clairs et hurlés avec une dynamique intense et aisée. Son chant hurlé reste tout de même esthétique mais ne perd pas en hargne, ni en efficacité et affiche également quelques nuances sur la profondeur. Les compositions, en plus des tempos véloces, gagnent alors encore davantage en ardeur et, par conséquent, en attrait. En fait, l’amélioration vient plus de ses lignes claires, aux légères consonances Power, désormais totalement maîtrisées et en adéquation avec les tonalités des guitares et claviers, même si l’on se doute qu’Auto-Tune n’a pas dû avoir le temps de prendre la poussière. Quoiqu’il en soit, cela donne lieu à d’excellents refrains travaillés, calibrés comme des tubes en puissance, avec blindage d’harmonies et mélodies accrocheuses, et loin de paraître niais. Majoritairement en voix claire, ceux-ci voient, néanmoins, parfois survenir un support plus sauvage qui ne fait qu’intensifier leur impact déjà conséquent (« Into The Parallel Universe »). Par moments, Tommy élargit également sa palette vocale, lors d’envolées Heavy/Power lyrique, où l’on sent alors qu’il est fan de Mikkel Sandager (ex-MERCENARY). Enfin, on relève quelques effets vocodés qui s’inscrivent, là encore, complètement dans le modernisme accentué des titres.
Sur ce troisième album, MYGRAIN explose de toutes parts et accumule les excès. Toujours plus de mélodies inondant l’auditeur, un sens de l’accroche vocale indéniable, une virtuosité à tout égard, une rythmique fougueuse et martiale, c’est la parfaite cohésion musicale que la formation recherchait depuis cinq ans, et vient tout juste d’atteindre. Le groupe s’est clairement repris en main, comme le montre aussi la réalisation de ses propres clips, et non simplement quelques fan made. Ainsi, cet opus propulse le son du combo à plus d’une vitesse supérieure et se révèle étonnamment riche et travaillé, en dépit de tout son côté easy-listening. MyGrain s’apparente, sans conteste, à un nouveau palier au sein des critères de qualité du Death Mélodique moderne ; cela a beau être next-gen et ultra mélodique, ce n’en est pas pour autant vide de propos et de technique. Un album destiné à être écouté inlassablement pour de purs moments de plaisir mélodique raffiné.
Ajouté : Vendredi 01 Avril 2011 Chroniqueur : CyberIF. Score : Lien en relation: MyGrain Website Hits: 11626
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