Nous faisons tous les jours de nouvelles découvertes musicales, même si nous n'oublierons pas DISSECTION de si tôt.

Octobre 2011. A demi-mots, Romain, chanteur et guitariste du groupe STORTREGN, évoquait dans nos pages l'importance qu'un Storm Of The Light's Bane a pu avoir pour eux. Dans leur quête identitaire, et peut-être dans leurs vies de tous les jours. D'ailleurs, cet album mythique a déjà une chose en commun avec Evocation Of Light : le bleu. D'abord la couleur, ensuite l'ecchymose. Il est vrai que depuis 2011 et la sortie de leur premier album, Uncreation, ces garçons à peu près aussi talentueux que sympathiques ont tapé dans le viseur des fans du regretté Nödtveidt. Il aurait été plus simple d'avouer leur volonté de reprendre le flambeau. Sauf que dans le genre, THULCANDRA est encore moins discret et que STORTREGN s'accroche à sa volonté d'être unique.

Raté ? Oui et non. Avec ce second opus, le quatuor suisse plonge tête baissée dans l'évocation d'une lumière, et pas n'importe quelle lumière. Celle du Black / Death Metal scandinave des nineties. Tantôt mélodique, tantôt viscéral, tantôt organique, jamais à court d'arguments. Ces arguments, on les connaît ; précision et tranchant du riff, breaks brossés, cadences infernales, parfois épiques, comme sur la très envolée "Moonshade". Pourtant, tout commence dans le romantisme, avec la douceur un peu fleur... bleue d'"Inner Black Flame", à deux doigts de faire penser au "Your Call" de SECONDHAND SERENADE. Idéal pour déclarer sa flamme, à l'inverse du coup de bambou qui intervient après 37 secondes. Fin des idéaux. STORTREGN se lance dans la bataille, frappe de ses leads nordiques un auditeur qui ne pourra que flancher sous le poids des assauts répétés. "Between Shadows And Souls", "Negative Theology", "So Much Dust...", autant d'efforts consentis qui rendent Evocation Of Light un poil plus musical qu'Uncreation et beaucoup plus impressionnant. Sans jamais rien réinventer, réinterpréter, revisiter, STORTREGN bluffe grâce à sa créativité et sa maturité. J'insiste particulièrement sur ce dernier point, car ces mecs qui sortent juste du four parviennent à déployer une panoplie hallucinante de riffs techniques et de variations rythmiques, le tout dégoulinant d'une production bétonnée et froide (certes un poil trop actuel pour soutenir durablement un regard dans le rétro). Ils n'ont pas encore dix ans de carrière, et on peut considérer que la leur commence seulement en 2011 avec la sortie d'Uncreation, mais l'illusion est parfaite. La vérité d'une piste n'est jamais celle de la suivante, et c'est ce qui rend Evocation Of Light simplement passionnant.

Il faut vraiment être exigeant pour trouver de vrais défauts à cet album, et ce sera peut-être son seul point faible. Ce Black / Death Metal mélodique est tellement bien écrit et exécuté qu'il convaincra sans trop forcer le fan lambda de Metal extrême qui, s'il a besoin de prises de risques pour s'épanouir, devra aller chercher son bonheur ailleurs. Mais est-il vraiment nécessaire de lui chercher à tout prix des nuances pour ne pas crier au génie trop vite, tant le boulot est bien fait ? Savourez. C'est le seul conseil que je puisse donner, à vous comme à eux.